Nous sommes  le 12 janvier 1937, à Moscou. Varlam Chalamov, journaliste, écrivain,  est arrêté pour « activité trotskiste contre-révolutionnaire ». Il est condamné à cinq ans de détention et envoyé dans la Kolyma, cette région à l'extrême-est de l'URSS, au-dessus du cercle polaire arctique. Une région que l’on appelle le « pays de la mort blanche ». Chalamov veut mourir : mal nourri, abruti de travail dans les mines d'or, gelé par le froid polaire, battu par les autres détenus … Il survit. En 1943, il écope d'une nouvelle condamnation, de 10 ans , pour « agitation anti-soviétique ». Son tort : avoir considéré l’écrivain Ivan Bounine, prix Nobel de littérature, comme un classique de la littérature russe. Plus tard, dans ses « Récits de la Kolyma », Chalamov , qui aura passer vingt-deux ans de sa vie au goulag, écrit : « Il ne faut pas avoir honte de se souvenir qu'on a été un « crevard », un squelette, qu'on a couru dans tous les sens et qu'on a fouillé dans les fosses à ordures [...].  Les prisonniers étaient des ennemis imaginaires et inventés avec lesquels le gouvernement réglait ses comptes comme avec de véritables ennemis qu'il fusillait, tuait et faisait mourir de faim. La faux mortelle de Staline fauchait tout le monde sans distinction, en nivelant selon des répartitions, des listes et un plan à réaliser. Il y avait le même pourcentage de vauriens et de lâches parmi les hommes qui ont péri au camp qu'au sein des gens en liberté. Tous étaient des gens pris au hasard parmi les indifférents, les lâches, les bourgeois et même les bourreaux. Et ils sont devenus des victimes par hasard. »

DANS L'ENFER DU GOULAG

1000 Jours dans l’Histoire

Nous sommes le 19 septembre 1943, à la prison de Moabit, à Berlin. Arrêté quelques mois plus tôt, interrogé, torturé pas les SS, un homme s’empoisonne dans sa cellule. Fait surprenant de la part des nazis, sa fille avait été autorisée à lui rendre visite et son père était parvenu à lui glisser un mot griffonné sur un bout de papier. Une fois chez elle, la jeune femme avait déplié le message et lu «  trouvez-moi du cyanure ».
L’homme est l’un des plus grands espions de la Seconde Guerre mondiale : agent allemand du Service de renseignement français, traitre au IIIe Reich, il a livré les secrets de la fameuse machine Enigma. Et pourtant, il reste inconnu du grand public. Il s’appelle Hans-Thilo Schmidt. Il fait partie de la grande famille des maîtres de l’espionnage ou plus exactement de l’une de ses branches, tant la communauté est complexe. Tentons d’en approcher quelques spécimens célèbres ou méconnus …

LES MAÎTRES DE L'ESPIONNAGE

Nous sommes le 2 juin 1795, à la prison du Temple à Paris. Il est 4h lorsque le chirurgien Philippe-Jean Pelletan constate la mort de Louis-Joseph Capet, deuxième fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Dès l’annonce de ce décès, déclaré comme étant de cause naturelle, la rumeur met en doute la fin de l’héritier de la couronne de France. C’est alors qu’un puissant courant « survivantiste » se forme qui affirme le principe de substitution : Le corps de l’enfant mort, enterré au cimetière de Sainte-Marguerite, serait, en réalité,  celui d’un petit anonyme jeté dans une fosse commune avec les guillotinés de la période de ce que l’on appelle la Terreur. Dans les années qui suivent, une foule d’individus vont prétendre être celui qui aurait dû devenir Louis XVII. Un cas qui, avec d’autres que nous allons observer, fait partie d’une longue série de morts célèbres revenant mystérieusement à la vie …

CES MORTS TOUJOURS VIVANTS

Nous sommes le vingt-deux décembre 1894. Le capitaine Alfred Dreyfus, juif d’origine alsacienne, est reconnu coupable de haute trahison par le conseil de guerre du gouvernement militaire de Paris. Il est condamné à la dégradation et à la déportation sur l’île du Diable, au large de la Guyane. Douze ans plus tard, Dreyfus est réhabilité et réintégré dans l’armée. Cette affaire, symbole aujourd’hui de l’injustice, donna, en Europe, une nouvelle impulsion à l’antisémitisme.

ALFRED DREYFUS OU L’INJUSTICE

Nous sommes le huit février 1587, il est dix heures du matin au château de Fotheringhay, dans l’est de l’Angleterre. Après dix-neuf ans d’emprisonnement, une femme en robe rouge se présente à son bourreau. Contrairement à la tradition, elle refuse de se dénuder totalement pour accueillir la mort. Elle se dit martyre catholique : on la juge pour haute trahison. On dit que l’homme qui doit lui trancher le cou est si maladroit,  ou si saoul,  qu’il devra s’y reprendre à trois fois. Arrivé à ses fins, il se saisit de la tête pour la présenter au public, mais il ne récolte que la perruque, la tête tombant sur le sol : la tête de Marie Stuart.

MARIE STUART, REINE D'ÉCOSSE

Nous sommes le samedi 19 novembre 1720, à Kingston, à la Jamaïque. A l’entrée du port, on peut voir un sinistre spectacle : les cadavre de trois hommes se balançant au bout de cordes. Parmi eux figure le célèbre pirate John Rackam. Ces hommes ont été exécutés la veille. Quatre autres le seront le lendemain et deux encore le lundi suivant. Voilà pour ce qui a déjà été décidé par la cour qui n’en a, toutefois,  pas fini avec la bande de forbans. Dans la prison de Port-Royal, il reste deux corsaires à juger. Et ceux-là embarrassent beaucoup le tribunal. Il faut dire que ces deux pirates se nomment Mary Read et Anne Bonny.

FEMMES PIRATES, LES ÉCUMEUSES DE MER

Nous sommes en novembre 1721. Thomas-Simon Gueullette, substitut du procureur royal, témoin de l’aventure du plus célèbre bandit de l’époque, note : « Je suis le premier surpris par l’évolution du personnage ; il y a quelques mois c’était l’ennemi public n°1, et peu à peu, les Parisiens se mettent à adorer celui qui tient tête au pouvoir, le nargue et impose sa violence. L’engouement enfle jour après jour et il se murmure que les visiteurs font la queue à la porte de son cachot, qu’on se dispute le plaisir de le voir, ce qui permet aux guichetiers d’empocher d’appréciables pourboires. On dit même que des dames de qualité lui rendent visite. » Un ennemi public en prison donc… C’est en effet le 14 octobre 1721, que Cartouche a été écroué.

CARTOUCHE, ROI DU PAVÉ DE PARIS

Nous sommes le 14 juillet 1789. A Paris. Il est 17h30. La Bastille, prison d’Etat, qui domine le faubourg Saint-Honoré, vient de se rendre. La foule, armée de piques, de sabres et de fusils, s’engouffre dans le vieux château. Les soldats se rendent un à un. Les officiers sont molestés, arrêtés ou tués. Le pillage commence. Les meubles, la vaisselle, le linge, tout est jeté par les fenêtres. Des centaines de milliers de documents, lettres de cachet, comptes rendus d’arrestations, procès-verbaux sont détruits, déchirés, brûlés. Heureusement, quelques érudits, des lettrés,  présents ce jour-là, en sauvent une grande partie. Mais ce trésor pour l’Histoire,  entassé dans un entresol poussiéreux,  est oublié durant des décennies.
Jusqu’au jour où un jeune conservateur découvre le précieux dépôt que l’on croyait à jamais disparu.

LA BASTILLE, L'HISTOIRE D'UNE PRISON

Nous sommes le 6 mars 1815, en fin de soirée, à Vienne. Les grandes puissances d’Europe sont réunies à Vienne, l’Autriche, l’Angleterre, la Russie, la Prusse et la France. On est en plein congrès, il s’agit de trouver des solutions pour ramener et garantir la paix Europe. La réunion qui a eu lieu, quelques heures, auparavant, a été apaisée. Les délégués ont pu dîner et un bal a même été donné. Ensuite, tout le monde est allé se coucher. On pensait pouvoir dormir du juste, c’était sans compter le coup de tonnerre qui allait résonner en pleine nuit : Napoléon a quitté l’île d’Elbe. On ignore où il se trouve.

LE RETOUR DE NAPOLEON

Jusqu'à sa mort en 1905 à 75 ans, Louise Michel, surnommée « La Vierge rouge », lutta pour les droits de l'homme, la justice sociale et le soutien à ceux qui manquent de tout. Nous sommes le matin du 22 janvier 1905, c’est une foule de plusieurs milliers de personnes qui assistent aux funérailles de celle que l’on a appelée « la vierge rouge ». Figure emblématique de la Commune de Paris. Cette insurrection populaire de 1871 réprimée sauvagement par les autorités. Bâtarde, institutrice, combattante, déportée en Nouvelle-Calédonie, mais aussi enragée et courageuse, éprise de liberté et d’absolu. Elle n’aura cessé de vouloir obstinément un monde meilleur, plus juste, et jamais  elle ne renoncera à la révolution ; Elle s’appelait Louise Michel.

LOUISE MICHEL

Nous sommes dans les premières années du vingtième siècle, en Afrique. Alors que l’expansion belge n’en est qu’à ses débuts, l’une des premières préoccupations de l’administration coloniale est de faire construire des centres de détention. Ils sont destinés aux Congolais, les indigènes comme on les nomme, mais aussi aux étrangers, aux blancs : à tous ceux qui ont enfreint la loi et les règlements ou qui se sont opposés à l’autorité coloniale. L’une des plus importantes prisons bâties à cette époque se situe à Stanleyville, aujourd’hui Kisangani, on l’appelle « Cent mille briques » du nom des briques cuites ou sèches utilisées pour son édification. Une institution qui aura pour principal objectif d’assurer la suprématie du colonisateur et d’exploiter les hommes et leurs territoires.

LES CENT MILLE BRIQUES

Nous sommes au lendemain de l’invasion de la Belgique par les troupes Allemandes et du retrait de l’armée belge sur Anvers. En octobre, la ville est tombée aux mains de l’ennemi. La reddition est signée le 10. Des centaines de milliers de civils fuient vers les Pays-Bas. Des soldats aussi, qui ont reçu l’ordre, avant de quitter leur poste, de mettre hors d’usage tous les équipements militaires qu’ils laisseraient derrière eux. Une trentaine de milliers de combattants qui, lors de leur arrivée de l’autre côté de la frontière, sont désarmés par les autorités hollandaises et internés dans des camps surveillés militairement, durant quatre ans. Certains seront rejoint par leur famille. A la fin du conflit, on va les traiter de planqués, de déserteurs. Le retour sera difficile dans un climat de revanche. Nous allons suivre le parcours de trois d’entre eux : Clément Francken, Louis Verdyck et Rik Wouters. Ces soldats, comme des milliers d’autres, sont les « oubliés » de la Grande guerre.

LES OUBLIÉS DE LA GRANDE GUERRE

Nous sommes le 8 mars 1951, à la prison de Sing-Sing, à cinquante kilomètres de New York. Il est 23h02, heure à laquelle est prévue l’exécution , sur la chaise électrique, de Raymond Fernandez, puni de la peine de mort pour le meurtre de Janet Faye, une veuve de 66 ans. Avant l’instant final , le condamné confie : « Je suis prêt à mourir. Ce soir, je mourrai comme un homme ». Une vingtaine de minutes plus tard, un prêtre protestant accompagne, vers la même chaise, Martha Beck la complice de Fernandez. Quelques temps auparavant, elle avait déclaré « dans l’histoire du monde, combien de crimes sont dus à l’amour ». Martha Beck et Raymond Fernandez n’ont commis qu’un seul meurtres. Combien , On ne le sait pas exactement. On les appelait « les tueurs de la lune de miel ».

LES TUEURS DE LA LUNE DE MIEL

Il est 6h du matin lorsque l'Officier Harold J. Brix effectue le comptage des prisonniers du bloc cellulaire dont il a la charge. Le détenu Frank Morris semble avoir le sommeil très lourd ce matin-là. Pas question de grasse matinée, dans la prison la plus dure des États-Unis. Le gardien frappe sur les barreaux avec sa longue matraque pour réveiller ce prisonnier. Son immobilisme défie toutes les règles du pénitencier qui, depuis son ouverture 30 ans plus tôt, a maté plus d’une forte tête. Harold J. Brix, fou de rage, fait ouvrir la cellule pour asséner un violent coup de matraque sur le crâne du détenu. Sous le coup, la tête de Frank Morris roule sur le sol de la cellule… Une tête qui en fin de compte ne ressemble que vaguement à celle du prisonnier. Mais l’important n’est pas là. Faite de chiffons, de plâtre et de papier, elle a parfaitement rempli son rôle. Le gardien prendra de nombreuses secondes avant de réaliser la situation et mettre, d’une main tremblante, son sifflet à la bouche pour donner l’alerte ! Il ne manque pas un, mais bien trois prisonniers à l’appel. Nous sommes le 12 juin 1962 à la prison la plus sécurisée et la plus redoutable des États-Unis. Le soleil se lève sur Alcatraz. Il est 6 heures du matin, c’est l’heure H de mon histoire.

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Alcatraz - L’enfer carcéral

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