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La Première

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Histoire

L'Heure H

La vraie Madame Bovary

43 min

| Publié le 05/06/23

Le soir vient de tomber sur la vallée de la Seine. Nous sommes à Croisset, près de Rouen. Le 19 septembre 1851. Un écrivain pénètre dans son cabinet de travail. Il a presque 30 ans. Il est loin d’être célèbre. Rondouillard, le ventre lesté, crâne dégarni, les yeux pochés. Il s’approche du fauteuil bleu. La nuit s’invite dans les cinq fenêtres qui s’ouvrent sur le jardin et le fleuve. Sa pièce à lui est vaste, basse de plafond. Il sent monter l’humidité de la Seine qui coule en bas. Cette humidité, quelle plaie ! Il appelle un domestique, lui demande d’allumer du feu, ici et dans sa chambre. Partout ! L’homme avance la main vers une plume d’oie qu’il trempe dans l’encrier, de l’encre de seiche, très noire, il ne tolère que celle-là. Gustave Flaubert a le vertige du papier. Sur sa table, ses plumes taillées forment comme un buisson d’épines où il va s’écorcher les mains et le cœur. Il se compare volontiers à son père, le grand chirurgien Flaubert avec son scalpel. Lui aussi a un scalpel. C’est sa plume. Il va disséquer ses personnages. Ce soir du 19 septembre, il se lance dans l’écriture de son roman « Madame Bovary ». Non pas Emma Bovary, mais madame Bovary, car c’est d’une femme mariée dont il veut tracer le destin.