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La Première

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Culture

"La rivière pourquoi" de David James Duncan et "La rivière" de Peter Heller

Entrez sans frapper

5 min

| Publié le 22/06/21

Double coup de cœur de Gorian Delpâture : "La rivière pourquoi" de David James Duncan (Monsieur Toussaint Louverture) et "La rivière" de Peter Heller (Actes Sud). "La rivière pourquoi" : De Portland aux côtes de l’Oregon, de torrents en cascades, de truites arc-en-ciel en saumons royaux, du désespoir à l’euphorie, qu’il croise un cadavre ou une sirène, Gus Orviston est un prodige de la pêche : même sans appât, il cherche à attraper l’insaisissable. Expulsé d’un paradis de lacs et d’affluents par des parents qui passent leur temps à s’envoyer leur canne à pêche au visage, Gus quitte le foyer familial et s’isole au bord d’une rivière idyllique où il peut enfin se plonger dans l’ascèse aquatique qu’il s’est choisi : la pêche. Et si pour lui la pêche résume le monde, le poisson en est l’énigme et au milieu, coule la rivière, ce méandre en forme de question, qui mène le jeu en interrogeant la vie et le bonheur. Avec drôlerie, sagesse et innocence, il nous entraîne dans sa quête du cours d’eau parfait, celui qui répondra à toutes ses questions. La Rivière Pourquoi est un hymne à une existence réconciliée avec nos passions et nos obsessions, avec la nature et ce que nous en faisons. C’est libre, c’est foisonnant, c’est profondément tendre. David James Duncan est un conteur hors pair, capable de dépeindre les âmes comme les paysages de façon fascinante, qui nous offre dans ces pages une aventure spirituelle en forme de roman un peu fou, poétique et surtout très drôle. C’est Kesey, c’est Harrison, c’est Brautigan. "La rivière" : Wynn et Jack, étudiants en pleine possession de leurs moyens, s’offrent enfin la virée en canoë de leurs rêves sur le mythique fleuve Maskwa, dans le Nord du Canada. Ils ont pour eux la connaissance intime de la nature, l’exper-tise des rapides et la confiance d’une amitié solide. Mais quand, à l’horizon, s’élève la menace d’un tout-puissant feu de forêt, le rêve commence à virer au cauchemar, qui transforme la balade contemplative en course contre la montre. Ils ignorent que ce n’est que le début de l’épreuve. Parce que toujours ses histoires, profondément hu-maines, sont prétextes à s’immerger dans la beauté des paysages, et parce qu’il a lui-même descendu quelques-unes des rivières les plus dangereuses de la planète, Peter Heller dose et alterne admirablement les moments suspen-dus, l’émerveillement, la présence à l’instant, et le sur gis-sement de la peur, les accélérations cardiaques, la montée de l’adrénaline. Ses descriptions relèvent d’une osmose enchanteresse avec la nature ; ses rebondissements, d’une maîtrise quasi sadique de l’engrenage. Ce cocktail redou-tablement efficace – suspense et poésie – est sa marque de fabrique. La Rivière n’y déroge pas.