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La Première

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Cinéma

La Bébel époque - Episode 6

Flic et voyou

51 min

| Publié le 17/07/23

Melville, Verneuil, Lautner, Deray ... Jean-Paul Belmondo a incarné 25 voyous et 6 flics, cultivant toujours un même goût de la marginalité. Ces personnages à la fois antagonistes et complémentaires, qui se prennent rarement au sérieux, occupent une place essentielle dans sa filmographie. Avec, à quelques notables exceptions près, un éternel sourire aux lèvres, la marque de fabrique du Belmondisme qui cultive le goût de la fripouille définitivement sympathique, de Godard à De Broca. Côté flic, on cultive en général la marginalité du policier d’exception rétif au système officiel et prompt à franchir allégrement la ligne jaune de la légalité, chez Deray ou Verneuil. Et des deux côtés de la barrière, une même capacité à faire parler les armes avant et après tout. Est-ce vraiment un hasard si la seconde apparition théâtrale de l’acteur Belmondo, en 1951, se déroule dans une pièce d’André Haguet intitulée Mon ami le cambrioleur : dans le rôle-titre du monte-en-l’air, il donne la réplique à Guy Bedos qui incarne, lui, le commissaire de police ! C’est donc le début d’une longue lignée et bien des années plus tard Belmondo tentera même, mais en vain, de porter à l’écran la vie de Jacques Mesrine, l’ennemi public numéro de la France des années 70 et 80. « Ce sont des marginaux les grands gangsters : ils ont des vies de roman comme Bonnie and Clyde ou Le Parrain » déclarait-il à l’époque ... Le Belmondo première manière ne se complait pas dans les univers très masculins et très sombres de Godard, Sautet et de Melville. Il lui arrive déjà d’arborer le sourire désarmant du voyou sympathique. En 1963, la même année que Le Doulos, sort ainsi Peau de banane de Marcel Ophuls. C’est la préfiguration des guignolos et autres braqueurs de banque déguisés en clown et qui viendront dans les années 80 chez De Broca ou Arcady. C’est le temps et le ton de la comédie. Escroc mais pas trop, comme dirait Woody Allen. Peur sur la ville marque un tournant. Pour leur sixième film ensemble, Henri Verneuil et Jean-Paul Belmondo décident de frapper un grand coup : l’éternel voyou du cinéma français devient un commissaire de policier parisien aux prises avec le redoutable Minos. Nul ne sait vraiment comment est née cette mini révolution mais la quarantaine aidant, Belmondo passe temporairement du côté de l’ordre et de la loi. S’instaure avec ce rôle un personnage de flic hors norme qui s’affranchit des règles et de l’autorité et selon qui la fin justifie largement les moyens, y compris les plus illégaux. Il incarne désormais la figure du solitaire au discours volontiers sécuritaire et réac. Changement radical de la donne portée par les dialogues de Francis Veber. Côté subtilité, il faudra repasser. Côté efficacité, le public est au rendez-vous, plébiscitant ce flic sans complexe.