L'Heure H

Jeffrey Dahmer, profession démon

Notre histoire commence à Portage, dans le Wisconsin. Le jour s’est levé il y a un peu moins de deux heures, et la prison d’Etat de Columbia, doucement, se met en route. Depuis déjà une heure, les détenus - dont certains comptent parmi les plus dangereux de tout le pays - sont occupés par leurs corvées. Dans le grand gymnase de la prison, dans un silence de mort, deux corps baignent dans leur sang. Ici et là, des traces de pas dans les flaques rouges indiquent que le tueur, ce matin, n’était pas là pour être précautionneux. Plus un bruit, pourtant, ne peut trahir sa présence dans l’immense complexe sportif aux fenêtres entravées de barreaux. Il est parti. Ses empreintes de pas le trahissent. D’abord très marquées, elles s’estompent au fur et à mesure de son parcours. Pour autant, elles sont suffisamment visibles pour tracer son itinéraire. S’est-il évadé ? Pas du tout. Il est retourné dans sa cellule. Christopher Scarver, c’est son nom. Une barre de fer à la main, il vient même d’appeler un gardien. Il est couvert de sang. Dans un sursaut de surprise, le maton sort son arme. Le prisonnier, lui, ne réagit pas. Il se contente de lever la tête et d’avouer ses crimes en quelques mots : « Dieu m'a dit de le faire. Jesse Anderson et Jeffrey Dahmer sont morts. » Il se trompe, car Jeffrey Dahmer, le représentant du Diable sur Terre, le nez contre le sol froid du gymnase, respire encore. Nous sommes le 28 novembre 1994, il est 8 heures 10 du matin, et c’est l’heure H, de mon histoire.