Grandeur Natureau coeur du Parc naturel régional des Baronnies provençales
au coeur du Parc naturel régional des Baronnies provençales
63 min
| Publié le 12/04/24
Influences alpines et provençales marquent les espaces du Parc naturel des Baronnies. Entre Hautes Alpes et Drôme, blottis au pied du Mont Ventoux et s'étendant jusqu'à Sisteron, paysages et villages surprennent. Des falaises d'Orpierre aux vallées du Buëch, en passant par les vergers ou oliveraies du pays Buxois, Grandeur Nature vous emmène sur les hautes terres sauvages et singulières de Provence. Les gorges de la Méouge, site d'exception Les Baronnies provençales, c’est ce Parc naturel régional qui s’étend entre les Alpes et le Mont Ventoux. En son cœur, coule notamment le Buësch qui se jette dans la Durance. Nous sommes dans un pays de gorges et cascades tourbillonnantes couleur vert turquoise ; un massif aux influences alpines et provençales. Ce mélange assure douceur du climat et paysages remarquables ; chaque vallée a sa faune et sa flore. Grandeur Nature se rend dans les gorges de la Méouge ; rendez-vous sur le pont roman. Plantes méditerranéennes et d’Afrique du Nord occupent ce décor minéral contenant une succession de marnes bleu ardoise, de grès gris bleuté et de calcaires sableux. « Ce site est reconnu pour sa flore et sa géologie, précise Théophane en charge de sa gestion Natura 2000. Mais il est un peu victime de sa beauté l’été. L’érosion a créé des toboggans et des marmites, des trous d’eau très appréciés des baigneurs. Tout comme ces plages de galets polis. » Mais les étés secs sont une période de stress pour la vie aquatique en recherche d’oxygène, comme pour le barbeau méridional. « Quand les enfants construisent de petits barrages, cela perturbe aussi les invertébrés qui ont besoin de caches sous les galets… » On pense aux pouponnières de libellules. Outre une grande diversité de papillons, comme le damier de la succise, on trouve ici le lézard oscellé. Comme les scarabées, ils apprécient la chaleur des roches. Le petit rhinolophe, lui, une chauve-souris qui pèse l’équivalent de deux morceaux de sucre, occupe les creux des falaises inaccessibles. On gravit maintenant la montagne de Chabre pour retrouver Mathieu. La montagne de Chabre pour la vue D’habitude, c’est en descendant en trottinette non motorisée qu’on la découvre autrement. Aujourd’hui, on utilisera à peine les pédales des quad-bike pour redescendre de son sommet qui offre une vue panoramique sur toutes les Alpes du Sud. On n’a pas dérangé la gélinotte des bois, ni le Circaète Jean le Blanc. Et encore moins le Grand-Duc d’Europe ou le Sonneur à ventre jaune. Ces quatre espèces patrimoniales vivent dans cette zone naturelle classée d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF). Entre 560 et 1352 m d’altitude, les climats supra-méditerranéen et montagnard mêlent forêt et un mélange étrange de pelouses, garrigues ou landes. Tout cela mérite bien, au retour, une bière brassée chez Céline et Olivier. Chimistes de formation, à Châteauneuf de Chabre, ils font désormais confiance aux arômes naturels et à l’eau issue d’un captage profond au pied des gorges de la Méouge. « Sans ajouter de sucre, on arrive à plaire à tout le monde avec notre production ». Le couple multiplie les recettes maltées et houblonnées. Pour le plus grand plaisir des locaux et des randonneurs harassés. En Baronnies, la nature souffle le chaud et le froid « Hiver comme été, j'aime transmettre des émotions sur ces sentiers de chèvre qui sillonnent la garrigue ». Jonathan Mathieu est guide de montagne et naturaliste. Un passionné d'orchidées. Une passion qui lui fait dire que nous devons prendre du bon temps dans la nature. Ce qu'on fait dans ses pas sur les hauteurs du village de Brande, dans la vallée du Toulourenc. Nous progressons en file parmi les genévriers sur le versant adret. Ce côté sud qui fait face au Ventoux encore enneigé en cette mi-mars. « Toulourenc est le nom de la rivière qui coule au fond de la vallée. Les pins noirs que vous voyez en face de l'autre côté de la vallée, ainsi que la hêtraie, ont été planté pour mieux gérer, la freiner et limiter l'érosion. » Pics noirs, chevreuils, cerfs élaphes ou sangliers apprécient ce milieu qui se referme depuis l’abandon du pâturage. Plus haut, à l'abri des mélèzes et des pins à crochets, chamois et mouflons se devinent entre les langues de neige et la caillasse. On transpire en progressant sur l’étroit sentier caillouteux. Les pins d'Alep procurent une ombre légère, tout comme les chênes pubescents. « Cette sorte de graminée n'en est pas une ! C'est la filante de Montpellier. Elle reste verte l'hiver et se contente d'un sol très maigre. Les montagnes de Provence ont une orientation est-ouest, ce qui donne un côté plus froid à la vallée et une végétation que l'on retrouve plutôt en milieu alpin. J’aime mettre en évidence ces effets versants très prononcés. » On retrouve ainsi le pavot du Groenland sur les hauteurs du Mont Ventoux ; ou encore, la vipère d'Orsine, endémique à ce milieu exceptionnel. Lavande fine de montagne et lavande aspic se distinguent par leur nombre de brins. On l'apprend. Une mésange charbonnière s’invite à nos oreilles. Au sol, des déjections confirment la présence de blaireaux. Dans un talus colonisé par des genêts, les dernières précipitations ont laissé la marque très nette du passage d'un chevreuil. Nous ne sommes pas seuls. Orpierre, la maison de la grimpe Nous sommes dans la vallée du Céans, au sud du département des Hautes-Alpes, à Orpierre exactement. Sébastien et Benjamin, deux moniteurs d’escalade chargés aussi de la sécurité et de l’entretien des parois rocheuses, nous emmènent au pied de Belleric. Une voie de 30 m d’une seule longueur, juste équipée pour une initiation surplombant une partie du village médiéval. « Outre les 300 jours de soleil par an, l’avantage d’Orpierre est que toutes les voies sont accessibles à pied. » Nul besoin donc de se déplacer en véhicule donc pour accéder au pied des falaises de tous niveaux. « Certains secteurs sont laissés aux oiseaux au printemps durant quelques semaines pour qu’ils puissent élever leurs jeunes en toute quiétude », explique Sébastien. Parmi les rapaces observables, le faucon pèlerin, l’aigle royal et le très menacé aigle de Bonelli. Plus d’une trentaine d’emplois sont liés au site d’escalade. Seuls les « équipeurs » locaux, agréés par la commune, ont le droit d’ouvrir des voies sur les falaises du village. Par la qualité et la diversité de son rocher, par son climat et sa température idéale, Orpierre, entre 700 et 1200 m d’altitude, permet de jouer avec les orientations. « On peut trouver de la fraîcheur l’été, ou du soleil à l’automne et au printemps. » C’est le cas en ce jour de mars qui signe le début de la saison jusqu’en novembre. L’été, il n’est pas rare dedénombrer mille grimpeurs sur l’ensemble des 670 longueurs d’escalade et autres sentiers. Nous sommes privilégiés. www.grimperaorpierre.fr www.orpierre-escaladedurable.com Il y a le ciel, le soleil et surtout les étoiles à Rosans Un accès à la voûte céleste pour tous est possible à l’observatoire des Baronnies Provençales de Rosans. Sur les routes de la lavande, aux Pays du Buëch, ce temple de l’astronomie bénéficie de l’absence de pollution lumineuse et d’une faible densité de population, loin des activités commerciales et industrielles. « On jouit de la même noirceur au zénith qu’au Chili, avec 230 nuits sans nuage en moyenne. Nos missions tournent autour de la surveillance du ciel concernant les astéroïdes et les débris spatiaux, mais aussi dans la recherche et le suivi d’exoplanètes », assure Sacha, astrophysicien passionné par les nébuleuses. Il nous invite autour d’un télescope géant, pour scruter Jupiter en plein jour. Le principal télescope robotisé de 820 mm permet de détecter les plus faibles lumières ; des planètes les plus proches aux galaxies plus lointaines. « Celle d’Andromède est visible à l’œil nu. Il n’y a pas que le grossissement qui est important, mais aussi la quantité de lumière. » Outre des stages et formations pour professionnels ou amateurs, des soirées d‘observation et d’initiation à l’astronomie sont aussi proposées à tous. « Le grand public peut vraiment se mettre dans la peau d’un astronome en séjournant sur place, en s’immergeant dans la vie des scientifiques et en s’initiant au logiciel gratuit Stellarium. Quinze places sont disponibles dans le confortable gîte situé juste à côté du centre. Cela permet aussi de financer nos recherches. » L’Observatoire offre aussi des services de contrôle à distance par internet des télescopes qu’il abrite. Pendant que quelque 9 100 satellites artificiels passent au-dessus de nos têtes, Anne-Charlotte trace les astéroïdes et s’échine à calculer leur trajectoire. On est rassuré par son assiduité à traquer en années lumières les projectiles venus d’ailleurs. Le paysan-herboriste accompagne le pouvoir des plantes Outre sa maison et son atelier en auto construction, Jean-François a notamment façonné trois terrasses dans un terrain en friche sur un versant sud à la sortie du village de Rosans. Il sème, taille, récolte, prélève, sèche et transforme en huiles et eaux florales menthes, bleuets, lavandes, roses, thyms… Mais aussi camomilles et autres bourgeons de pins. Le tout pour nous faire du bien. « Le pin sylvestre, qui recolonise d'ancien pâturages, donne de très bonnes huiles essentielles. On ignore beaucoup le pouvoir des fleurs et la capacité du végétal à nous faire du bien à travers des sirops à partir d'hydrolats ou autres transformations et extractions. J'aime revenir à cette simplicité. » L’herboriste sait que, comme avec le vin qu'il a autrefois cultivé quand il était Jurassien, les plantes ont leur millésime. Aujourd'hui, c'est jour de taille pour les menthes ; les six variétés de roses qu'il cultive, recevront aussi la visite du sécateur. « . Il faut 100 kg de lavande pour produire un litre d'huiles essentielles. Dans toutes les plantes, il y a de l'eau floral et des huiles. Mais dans le bleuet, le plantain, l'aubépine ou l'ortie, on ne trouve que de l'eau florale. » Les rendements sont très variables d'une année à l'autre. « Il est important de conserver une vraie connexion avec les plantes. J'en possède une quinzaine en culture, mais j'en prélève près de quatre-vingt différentes dans les espaces sauvages », explique encore Jean-François qui utilise différents alambiques. Il a récupéré d'anciennes cuves en cuivre et mixte les sources d'énergie entre solaire et bois. « Nos régions deviennent des déserts médicaux. On ne se substitue pas aux docteurs, mais le paysan-herboriste a un vrai rôle à jouer. »