La Belgique ? Une entité pas comme les autres en Europe. La révolution de 1830 accouche d’un pays moderne. Il ne correspond pas à l’équation Langue/État/Nation, mais à un double héritage latin et germanique. De cette particularité surgit, en un demi-siècle seulement, la première littérature francophone consciente d’elle-même et porteuse de chefs-d’œuvre dans lesquels s’inventent des formes issues de cette Histoire singulière. Mocke, De Coster Verhaeren, Maeterlinck… Cette jeune littérature, qui émerge dès les années suivant la bataille de Waterloo et le Congrès de Vienne est traversée les hantises, les singularités qui vont perpétuer le mythe national belge – comme il y par ailleurs un mythe français ou allemand. Directeur des musées et archives de la littérature auteur de « Histoire, forme et sens en littérature : La Belgique francophone. Tomes I et II » (Ed Peter Lang, Marc Quaghebeur retrace en deux parties plus d’un siècle de cette littérature nationale de 1815 à 1918.

Si notre monde actuel est le monde de l’image omniprésente et envahissante, vers 1815, il n’en était pas ainsi. Quelques rares privilégiés avaient accès aux tableaux, ou à quelques gravures, et si l’homme des couches populaires voyait dans toute sa vie une dizaine d’images, c’était déjà beaucoup. Le XIXème marque la révolution industrielle, mais aussi, et étonnamment particulièrement en Belgique, il marque aussi la multiplication de l’image, sous toutes ses formes, et ce, non seulement auprès de la bourgeoisie de plus en plus nombreuse, mais aussi: auprès des couches populaires. Marie Christine CLAES, docteur en histoire de l’Art à l’IRPA, a fait une découverte surprenante: la majorité des images, et donc surtout des estampes, puis des daguerréotypes, puis des photographies, nous ont été amené tout le long de ce siècle par des colporteurs Italiens, venant tous d’un petit village, situé dans la région du Trentin: PIEVE TESINO. On  appelait ces colporteurs: les TESINI. Toujours sur les routes, très au fait de toutes les découvertes technologiques, implantés dans toute l’Europe, c’est eux qui ont contribué, par leurs réseaux, à imager auprès de toute la population les évènements de la vie. Vendant d’abord des images pieuses, comme en France les Images d’Epinal, très vite, grâce à l’apparition de la lithographie, puis de la photographie, on a vu apparaitre des images dans les journaux, des illustrations dans les livres, mais aussi: des images d’actualité, ou des publicités. 1850 ? Quelques TESINI s’implantent déjà en Belgique et ouvrent boutique au cœur de nos grandes villes. Et c’est ainsi que tout un chacun, selon ses possibilités financières, peut acquérir un tableau, une estampe, un souvenir d’un évènement... Ou acheter tout le matériel nécessaire pour la peinture, le dessin.... Et bientôt, à la fin du siècle: acheter des plaques photosensibles déjà préparées pour mettre dans leur appareil photo

LES TESINI OU LA RÉVOLUTION DE L’IMAGE

1000 Jours dans l’Histoire

Nous sommes au lendemain du 18 juin 1815. Walter Scott, l’auteur de « Ivanhoé » écrit dans les « Lettres de Paul à sa famille » : «Les pèlerinages que les familles anglaises et nos touristes ont fait au champ de bataille ont été si nombreux que les paysans du voisinage se sont enrichis par l’événement même qui les menaçait d’une ruine totale. La bonne vieille flamande qui tient le principal cabaret de Waterloo avait même découvert déjà, lorsque j’y étais, tout le prix de sa situation et triplé le prix de notre café, parce qu’elle nous faisait l’honneur de nous montrer le lit dans lequel le grand Lord avait dormi la veille de la bataille. Jusqu’où a-t-elle fait monter depuis lors l’impôt levé sur la curiosité anglaise ? »

1000 Jours dans l’Histoire
UN SIÈCLE DE LITTÉRATURE NATIONALE

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